Articles du Vendredi : Sélection du 19 décembre 2014

Pour prévenir le changement climatique, les écologistes doivent cibler les compagnies pétrolières

Bill McKibben – 22/12/2012
www.reporterre.net/spip.php?article3662

Klima aldaketa: erabaki garrantzitsuak 2015erako utzi dituzte

Unai Brea
www.argia.eus/blogak/unai-brea/2014/12/15/klima-aldaketa-erabaki-garrantzitsuak-2015erako-utzi-dituzte/

Climat: les 5 leçons de la conférence de Lima pour Paris2015 !

Maxime Combes
http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes/161214/climat-les-5-lecons-de-la-conference-de-lima-pour-paris2015

La justice, grande absente des résultats de Lima

Attac France, Collectif
https://france.attac.org/se-mobiliser/vers-la-cop21/article/la-justice-grande-absente-des

Climat ou TAFTA, il faut choisir

AITEC, Attac France
https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports-37/article/climat-ou-tafta-il-faut-choisir

Trémargat, laboratoire d’alternatives et de démocratie participative à ciel ouvert

Marion Guyonvarch
www.bastamag.net/Reportage-Tremargat

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Pour prévenir le changement climatique, les écologistes doivent cibler les compagnies pétrolières

Bill McKibben – 22/12/2012
www.reporterre.net/spip.php?article3662

Malgré la connaissance que nous avons de la gravité du changement climatique, le mouvement écologiste échoue à mobiliser la société. C’est qu’il lui manque un ennemi clairement identifiable, estime Bill McKibben. Qui propose de cibler les compagnies pétrolières


Bill McKibben est un journaliste états-unien devenu activiste. En 1989, il avait écrit The End of nature, un essai important qui analysait, un des premiers, les conséquences du changement climatique sur la société humaine. Dans les années récentes, il a participé à la création de l’organisation 350.org et à la campagne contre un oléoduc entre les sables bitumineux de l’Alberta, au Canada, et les raffineries du Texas. Dans un article paru dans la revue Rolling Stone en août 2012, « Global warming’s terrifying new math », il expose une stratégie de lutte contre le changement climatique. En voici le résumé.

……………………….

L’auteur évoque d’abord trois chiffres à l’importance cardinale :

2° C  : adopté à la conférence des Nations unies sur le climat à Copenhague, en décembre 2009 : « l’augmentation de la température planétaire devrait rester inférieure à deux degrés Celsius ». C’est le seuil de réchauffement, par rapport à la température qui prévalait avant la révolution industrielle, au-delà duquel les conséquences deviendraient insupportables.

565 milliards de tonnes de dioxyde de carbone : quantité estimée de ce que l’on peut encore déverser dans l’atmosphère sans dépasser ce seuil de 2° C (1).

2 795 milliards de tonnes de dioxyde de carbone  : quantité estimée de CO2 contenue dans les réserves connues de gaz, pétrole et charbon, selon Carbon Tracker Initiative .

Si l’on consomme toutes les réserves de ces combustibles fossiles, on émettra donc dans l’atmosphère cinq fois plus de dioxyde de carbone qu’il n’est souhaitable si l’on veut rester en-deçà d’un réchauffement de 2°C. Brûler tous ces combustibles garantit un réchauffement massif aux conséquences désastreuses. Il faut donc en laisser enfouis sous la terre 80 %.

Mais cela supposerait que les compagnies énergétiques abandonnent près de 20 000 milliards de dollars de ce capital (évalué au total à 27 000 milliards de dollars).

Le deuxième volet de l’argumentation constate que les efforts du mouvement écologiste pour prévenir le changement climatique ont jusqu’à présent échoué. Les émissions planétaires se poursuivent même à un rythme supérieur à ce qu’il était il y a une dizaine d’années. Cet échec signifie « que nous en savons beaucoup sur les stratégies qui ne marchent pas » [souligné par McKibben]. Par exemple, chercher à changer le mode de consommation du public ne fonctionne pas. L’action sur le système politique est tout aussi inefficace : Obama, pourtant sensible à la question du changement climatique, a ainsi déclaré en mars : « Vous avez ma parole que nous continuerons à forer [pour trouver du gaz et du pétrole] partout où nous le pourrons ».

En fait, poursuit l’auteur, « les efforts que nous avons déployés pour empêcher le changement climatique n’ont jusqu’à présent produit que des mouvements graduels et hésitants. Un changement rapide de transformation suppose de former un mouvement, et un mouvement demande des ennemis (…). Les ennemis est ce dont le changement climatique a manqué ».

Les chiffres exposés au début de l’article indiquent clairement qui est l’ennemi principal : « Compte tenu de ces statistiques, nous devons considérer l’industrie des combustibles fossiles sous un nouvel éclairage. Elle est devenue une activité voyou, plus dangereuse qu’aucune autre force sur Terre. Elle est l’Ennemie Numéro Un de la survie de la civilisation planétaire ».

Selon Carbon Tracker, les six firmes possédant les plus grandes réserves sont Exxon, BP, Gazprom, Chevron, ConocoPhillips et Shell. A elles six, elles concentrent un quart du budget carbone de la planète.

McKibben explique enfin un facteur essentiel de la nocivité de cette industrie : « l’industrie des combustibles fossiles est la seule qui est autorisée à balancer gratuitement dans la nature son principal déchet, le dioxyde de carbone ». Toutes les autres activités économiques doivent payer pour la gestion de leurs déchets. Mais dans le cas des fossiles, ce n’est pas le cas. Et les compagnies s’y opposent, parce que mettre un prix sur le carbone diminuerait fortement la profitabilité.

Et l’auteur de conclure : « Le changement climatique opère sur une échelle géologique, mais ce n’est pas une force impersonnelle de la nature ; plus vous rentrez dans le détail des chiffres, plus vous réalisez que c’est, au fond, une question morale. Nous avons trouvé l’ennemi, et c’est Shell ».

…………………….

Notes :

(1) Ce chiffre de 565 provient de Carbon tracker initiative. Cet organisme s’inspire d’une étude importante parue dans Nature en 2009, par Meinshausen et al.). Meinshausen et son équipe calculaient le budget carbone – combien il nous reste à émettre si l’on veut rester en-deçà de 2°C. Soit 1000 gigatonnes de CO2 entre 2000 et 2050. Carbon Tracker Initiative en retranche ce qui a été émis entre 2000 et 2011, ce qui conduit à 565 milliards de tonnes. Notons que sur les 38 ans qu’il reste d’ici 2050, cela signifie 15 milliards de tonnes par an, soit deux fois moins que le rythme actuel (32 milliards de tonnes en 2011 selon l’AIE).

Source : Hervé Kempf pour Reporterre

Klima aldaketa: erabaki garrantzitsuak 2015erako utzi dituzte

Unai Brea
www.argia.eus/blogak/unai-brea/2014/12/15/klima-aldaketa-erabaki-garrantzitsuak-2015erako-utzi-dituzte/

Itxaropenerako tarte txiki bat ireki arren, orobat porrot sentsazioa gailendu da Limako Klimaren Gailurraren ostean. Lehen aldiz munduko herrialde guztien arteko akordio bat sinatu da, baina akordio ahula da, konpromiso sendorik gabea. Beroketa globala bi gradutik gorakoa izan ez dadin zerbait egitea eskatu zuten zientzialariek azaroan; tamalez, Limako Deia deitua izan den bost orrialdeko adierazpenak ez du neurri eraginkorrik ezarri.

Limako Klimaren Gailurra, COP20, hainbat arrazoirengatik izan da berezia. Batetik, aste batzuk lehenago AEBek eta Txinak beren gas emisioak murrizteko sinatutako akordioak baikortasuna eragin zuen; bazirudien mundu mailako adostasun zabal baten atarikoa izan zitekeela hura. Bestetik, NBEren Klima Aldaketari buruzko Aditu Taldeak, IPCCk, ohar larria egina zuen azaro hasieran: karbonorik gabeko ekonomiaranzko urratsak ematea ezinbestekoa da, planetako tenperatura globalaren igoera bi gradutik gorakoa izan ez dadin; langa hori gainditzeak hondamendia izan dezake ondorio.

2020tik aurrera Kyotoko Protokolo zaharkitua ordezkatuko duen akordioaren zirriborroa adosteko bildu dira munduko agintariak Liman. Datorren urtean Parisen egingo den konferentzian eman beharko zaio akordio horri behin betiko forma, eta Liman ikusitakoaren arabera, lan handia dago egiteko datozen hamabi hilabeteetan.

Konpromiso irmorik gabe oraingoz

Kyotokoak ez bezala, protokolo berriak estatu guztiak neurriak hartzera behartzea nahi da. Baina neurri horien zehaztapena gerorako utzi dute. COP20tik atera den dokumentuak, Limako Deiak, dio herrialde bakoitzak 2015eko urriaren 1erako aurkeztu beharko duela klima aldaketari aurre egiteko plan bat.

Testuaren azken bertsioak ahuldu egiten du konpromisoaren indarra, ez baita inondik inora hasierakoa bezain loteslea. Estatuei “aukera” ematen die, lehengo “beharraren” ordez. NBEk azaroaren 1ean eduki beharko du prest herrialde guztien plangintzen sintesia. Hau da, hilabete besterik ez da egongo COP21 hasi aurretik. Oso denbora laburra da testu bateratua prestatzeko, batez ere kontuan izanda herrialde garatuek eta garapen bidean daudenek oso ikusmolde desberdina dutela klimarekiko erantzukizunaz. Desadostasun hori oso agerikoa suertatu da Liman, eta gailurra bi egunez luzatu izanaren arrazoi nagusia izan da.

Funts Berdea, helburutik oso urrun

Finantzazioa beste desadostasun iturri handi bat da. Nork ordaindu behar ditu klima aldaketak eragindako gastuak? 2011n Klimaren Funts Berdea sortu zen; asmoa da herrialde aberatsenek diruz horni dezatela, eta diru horrekin garapen bidean daudenek klima aldaketa moteltzeko eta hari egokitzeko proiektuak gauzatu ahal izatea. 2020an 100.000 milioi dolarrera iristea da helburua, baina Limako Gailurra eta gero ozta-ozta gainditu dira 10.000 milioiak. NBEk arrakastatsutzat jo du lorpen hori… eta COP20 osoa.

Climat: les 5 leçons de la conférence de Lima pour Paris2015 !

Maxime Combes
http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes/161214/climat-les-5-lecons-de-la-conference-de-lima-pour-paris2015

La conférence internationale sur le changement climatique s’est terminée dans la nuit du 13 au 14 décembre à Lima (Pérou). Prolongée de 36 heures, elle n’a guère apportée de réponses aux défis actuels. Quels enseignements en tirer dans l’optique de la prochaine conférence qui se tiendra à Paris en décembre 2015 ? Quelles implications pour les mouvements pour la justice climatique ?

1. Il n’y aura pas d’accord historique à Paris en 2015

François Hollande a annoncé vouloir laisser « sa trace » dans l’histoire et, pour ce faire, obtenir un « accord historique » à Paris. Laurent Fabius devrait le prévenir : s’il y a accord à Paris, il ne sera pas historique. C’est Laurence Tubiana, la représentante de la France dans les négociations qui l’affirme, essayant de tempérer les attentes par rapport à la prochaine conférence de l’ONU en décembre 2015 sur l’aéroport du Bourget : « A Paris, nous ne serons pas en capacité d’être dans un scénario de limitation du réchauffement à 2 °C ». Voilà qui est clair, lucide et fondé.

En effet, à Lima, contrairement aux recommandations du GIEC et aux attentes légitimes, les Etats ne sont pas engagés à améliorer leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020 : l’écart entre ce qu’il faudrait faire et ce qui est sur les rails ne cesse de s’accroître là où il faudrait qu’il se réduise rapidement et fortement. Quant à l’après 2020, il pourrait se résumer ainsi : « en 2015 chaque Etat est invité à noter sur le bout de papier de son choix, et selon la forme de son choix, ce qu’il envisage de faire, sans contrainte et sans qu’il ne soit exigé de lui de l’ambition et de la cohérence avec l’objectif des 2°C ».

Par ailleurs, la conférence de Lima avait pour ambition de préfigurer le futur (et éventuel) accord de Paris en élaborant une première mouture du texte et en solutionnant certains sujets pour éviter d’avoir à le faire en 2015. C’est raté. Le brouillon (de 38 pages !) n’est guère plus qu’une compilation de propositions contradictoires. Et aucun des problèmes clefs n’a été résolu. A commencer par l’épineux problème de la différenciation des Etats – chaque pays n’a pas la même responsabilité et la même capacité à agir – qui relève plus des enjeux géopolitiques de ce début du XXIème siècle que de la climatologie.

2. Des négociations climatiques ? Non, des négociations géopolitiques

Nous pouvons espérer de la Conférence de Lima qu’elle ait définitivement permis de clarifier la situation : les pays et groupes de pays s’opposent moins en raison de l’importance qu’ils donnent à l’urgence climatique qu’en raison des implications géopolitiques des différentes propositions sur la table. Le protocole de Kyoto séparait le monde en deux, pays développés contre pays en développement. Les Etats-Unis, l’Union européenne et leurs alliés veulent arracher la Chine, l’Inde, le Brésil, et quelques autres grands pays émergents, à l’alliance du G77 regroupant tous les pays du « Sud ».

La conférence de Lima a montré que cela n’arriverait pas de sitôt : la Chine ne renoncera pas à son alliance avec les pays pauvres et vulnérables et ces derniers ont trop à perdre pour accepter un nouvel équilibre géopolitique planétaire dont ils ne voient pas ce qu’il pourrait leur apporter. Ce d’autant plus qu’ils voient par contre parfaitement que les pays du Nord rechignent à mettre la main à la poche et à réduire drastiquement leurs propres émissions.

La différenciation des pays fait l’objet de toute une série de propositions contradictoires. Prétendre aujourd’hui que cette question sera résolue d’ici Paris est un pari plus qu’osé (voir cet article sur Basta pour une explication plus complète).

3. L’accord Etats-Unis – Chine n’a rien changé à la situation

Journalistes, dirigeants politiques et certaines ONG l’avaient martelé à satiété : la déclaration conjointe – ce n’était pas un accord en bonne et due forme – entre les Etats-Unis et la Chine présentée par surprise le 12 novembre allait changer la donne dans les négociations sur le changement climatique. Ils affirmaient, bien que ce soit déjà très discutable (voir ce décryptage), que cette déclaration conjointe allait déverrouiller les négociations, inciter les pays récalcitrants (Canada, Australie, Japon, Nouvelle-Zélande etc.) à revoir à la hausse leur ambition et permettre de dépasser le mode de gouvernance du climat institué par le protocole de Kyoto.

La Conférence de Lima vient de montrer que tous ces commentateurs se sont trompés. Si les Etats-Unis ont annoncé un (faible) objectif de réduction d’émissions pour 2025, il n’en continue pas moins de vouloir affaiblir tous les principes pertinents qui régulent les négociations climatiques. De son côté, si la Chine accepte de jouer d’égal à égal au sein de ce nouveau G2 planétaire qui (dé)régule la planète, il n’est pas question pour elle de renoncer à son alliance stratégique avec les pays du Sud. Par ailleurs, cette déclaration conjointe n’a généré aucun effet d’entraînement sur les pays récalcitrants qui, au contraire, l’utilisent pour calquer leurs futurs engagements sur les annonces limités du G2.

La conférence de Lima vient donc de refermer une période d’à peine un mois pendant laquelle quelques ONG et un nombre conséquents de journalistes et commentateurs politiques faisaient preuve d’un soudain et peu fondé optimisme sur l’avenir des négociations climat, optimisme assez similaire à celui précédant Copenhague – et dont on sait ce qu’il est advenu.

4. Un nouveau cycle de mobilisations pour la justice climatique

Les mobilisations et initiatives pour la justice climatique qui se sont tenues à Lima semblent confirmer que la déprime et la fragmentation des mouvements pour la justice climatique qui ont suivi la conférence de Copenhague (2009) semblent bel et bien dépassés. A la plus grande manifestation jamais organisée sur les enjeux climatiques en septembre à New York (Plus de 300 000 manifestants à New York et sans doute 600 000 à l’échelle de la planète) succède la plus grande manifestation de ces dernières années sur le sujet en Amérique du Sud (20 000 manifestants le 10 décembre dernier).

Dans les deux cas, il y a eu plus de manifestants qu’attendu, venus en moyenne sur des bases plus radicales et plus éloignées des négociations que le point d’équilibre des structures organisatrices. C’est ainsi une banderole « Changeons le système et pas le climat » qui ouvrait la manifestation de Lima et la majorité du cortège, notamment les blocs jeunes, assez imposants et déterminés, ne comportait pas de référence directe au contenu précis des négociations : les messages renvoyaient le plus souvent aux luttes menées par chacun des groupes.

Sur (l’autre) route de Paris, Lima tend donc plutôt à confirmer qu’un nouveau cycle de mobilisations massives en faveur de la justice climatique s’est ouvert et qu’il s’appuie plus aisément sur les luttes en cours (résistances anti-extrativistes, contre les grands projets inutiles, pour les défense des territoires, pour la promotion et la mise en œuvre d’alternatives systémiques et la transition écologique et sociale etc.) que sur des revendications portant sur les négociations proprement dites.

5. Les leçons de Copenhague semblent avoir été retenues

Pour les ONG et les mouvements sociaux et écologistes français membres de la Coalition Climat 21, la conférence de Lima a permis de poursuivre les discussions – ouvertes en plusieurs occasions tout au long de l’année – avec les ONG, réseaux et mouvements internationaux. L’enjeu : élaborer des positions communes qui tirent les leçons des succès et limites des mobilisations pour la justice climatique passées (notamment celles de Copenhague en 2009 et de New York en septembre 2014) et qui permettent l’implication d’organisations et réseaux finalement très divers de par leur histoire, leurs positionnements et leurs cultures politiques.

A Lima, les discussions ont nettement progressé. La Coalition Climat 21 est désormais reconnue comme l’interlocuteur unique et légitime pour l’ensemble des grandes ONG et réseaux internationaux qui ont, à plusieurs reprises, salué le travail conjoint entrepris et les premières initiatives de mobilisation déjà lancées (notamment, et surtout, la dynamique Alternatiba).

Lima a également permis d’avancer vers ce qui pourrait être une position commune : ne pas se focaliser sur la COP21 et les négociations mais mettre l’accent sur l’agenda propre des ONG et des mouvements afin de ne pas être dépendant des résultats de la conférence officielle – à cet égard la victoire engrangée par les Amis de la Terre, Attac France et Bizi! contre la Société générale (voir ici) est emblématique de ce qu’il est possible de faire ; ne pas faire pas de Paris2015 une mobilisation à un coup mais se servir de Paris comme d’un moment d’agrégation et d’accumulation de forces en s’appuyant sur d’autres mobilisations internationales en 2015 (le mois de juin et les 26-27 septembre ont été notés dans les agendas) et en se projetant sur de nouvelles mobilisations internationales dès le premier semestre 2016 ; à Paris, pendant la conférence, ne pas se limiter à une manifestation en début de conférence mais au contraire construire d’ores-et-déjà des initiatives de masse en fin de conférence pour « avoir le dernier mot », ce qui revient à vouloir être acteur et prescripteur, et non simplement spectateur, de la séquence finale (voir cette analyse qui détaille cette proposition).

Bien-entendu, il est encore trop tôt pour dire si les conditions sont réunies pour que Paris soit l’acte de (re)naissance symbolique d’un vaste mouvement international pour la justice climatique qui se maintienne à de hauts niveaux de mobilisations locales, régionales et internationales lors des prochaines années. C’est en tout cas le pari que proposent aujourd’hui les ONG et les mouvements sociaux et écologistes pour combattre l’agenda extractiviste et productivisme des promoteurs de la globalisation économique et financière. C’est l’autre route qui nous conduit à Paris depuis Lima.

Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)

Pour aller plus loin, lire cette analyse : Que faire d’ici Paris2015 ? Analyses et perspectives 

La justice, grande absente des résultats de Lima

Attac France, Collectif
https://france.attac.org/se-mobiliser/vers-la-cop21/article/la-justice-grande-absente-des

Tard dans la nuit de samedi à dimanche, les 194 États de la planète sont parvenus à un accord dans le cadre de la convention cadre de l’ONU sur le dérèglement climatique. Loin d’être satisfaisant, cet accord hypothèque tout accord historique à Paris fin 2015. Les mouvements et ONG pour la justice climatique, notamment Attac France et les Amis de la Terre, ont rendu public cette première analyse.

 

Le monde est confronté à une urgence planétaire : le changement climatique est causé par un système qui place la recherche du profit au-dessus des besoins des personnes et des limites de la planète. Il dévaste la vie de millions de personnes à travers la planète. Selon les scientifiques du climat, des basculements critiques pourraient se produire prochainement et la température moyenne globale pourrait s’accroître de 4 à 5°C avec des conséquences catastrophiques pour nous tous.

La Conférence de Lima aurait dû poser les jalons de la façon dont les gouvernements allaient prendre des mesures urgentes pour lutter contre le changement climatique et pour soutenir les populations vulnérables de la planète à s’adapter aux inévitables conséquences.

Il s’agissait de réduire plus fortement les émissions d’ici à 2020 et de fixer des objectifs climatiques à long terme pour ne pas augmenter la température de plus de 1,5°C. Ne pas émettre plus que ne le permet le budget carbone et répartir ce dernier sur la base des principes de responsabilités communes mais différenciées, des capacités respectives des pays et de la nécessité d’honorer la dette climatique.

Ce qu’il s’est passé à Lima s’inscrit dans une longue série de décisions qui, chaque année, affaiblissent les règles internationales sur le climat, mettant en difficulté les populations et la planète.

Les engagements de réduction d’émissions pour l’avant 2020 sont injustes et beaucoup trop faibles. Ils conduiraient à dépasser les 2°C de réchauffement climatique d’ici le milieu du siècle. Ces objectifs n’auront pas été revus à la hausse en 2014, pas plus qu’il n’y a d’engagement à les réeaxaminer et les revoir prochainement.

Lima nous prépare à un accord à Paris qui ignorera les besoins et les droits des populations impactées dans le monde, excluant tout engagement contraignant en matière de contribution financière, d’adaptation, de perte et dommages et de transfert de technologie.

La Conférence de Lima n’a pas su établir un pont entre les actions que les pays doivent prendre et les technologies et financements nécessaires qui pourraient permettre aux populations du Sud de s’adapter, de construire leur résilience et de faire face à la perte et aux dommages occasionnés par les impacts du changement climatique. Pas plus qu’elle n’a permis de mettre sur les rails les nécessaires actions de réduction d’émissions sans lesquelles l’ampleur de la transformation et de la transition juste dont nous avons besoin pour limiter la hausse de température inférieure à 1,5 degrés C ne sera pas atteinte.

Ce qui a été décidé à Lima ouvre la possibilité à ce que chaque pays détermine ses propres engagements en matière de climat, sans que ces derniers ne tiennent compte de ce que demandent la science, les populations et les exigences de justice, et sans cadre réglementaire clair. Nous avons vu des dirigeants politiques, en particulier ceux des États-Unis, de l’Union européenne et de leurs alliés, agissant dans l’intérêt des grandes entreprises polluantes, déterminés à déréglementer davantage le régime de gouvernance international du changement climatique. Ce faisant, ils sapent la convention sur le changement climatique des Nations Unies dans ses fondements, en affaiblissant les règles portant sur les pays développés et en ignorant leur obligation légale et morale de débloquer des financements suffisants et de transférer les technologies.

À Lima, l’expansion de l’utilisation des marchés carbone, qui ont pourtant échoué, a été largement encouragée. Y compris à travers l’utilisation de crédits carbone issus des forêts et des sols, source de dévastations supplémentaires pour les populations paysannes et forestières à travers le monde, empêchant les transformations dont nous avons besoin.

Le Sommet des peuples et la marche dans les rues de Lima ont exigé la défense des droits de la nature et la garantie des droits des populations. Ils ont clairement mis en lumière ce que sont les solutions à la crise climatique et les alternatives.

Partout sur la planète, les populations mettent en oeuvre ces solutions et luttent pour transformer le système. Nous luttons pour survivre et pour garantir et sécuriser nos territoires, habitations et moyens de subsistance face aux dérèglements climatiques.

Nous nous battons pour une transformation du système énergétique visant à abandonner l’usage des énergies fossiles au profit de systèmes énergétiques accessibles à tous, contrôlés par les populations, décentralisés, sûrs et basés sur les énergies renouvelables. Nous défendons la souveraineté alimentaire et le développement des solutions agro-écologiques, tout en luttant pour s’adapter aux conséquences dévastatrices des dérèglements climatiques. Ainsi, les programmes de foresterie basés sur les populations fonctionnent dans leur intérêt, particulièrement ceux des populations indigènes, plutôt qu’en faveur des banquiers et des capitales financières dans le Nord.

Les populations accumulent de la force et du pouvoir, au niveau local, national et global. Nous allons continuer à mettre plus de monde dans les rues, à bloquer des projets d’extraction de ressources naturelles, des ports, des sièges d’entreprises, pour que notre force et notre pouvoir grandissent.

Nous allons reprendre le pouvoir que nous ont confisqué ceux qui n’agissent pas dans notre intérêt. Nous résisterons aux velléités d’imposer un « accord mondial sur le climat » qui ne fasse rien pour le climat et encore moins pour les populations.

Ici à Lima, ils ont essayé de nous enterrer. Mais ce qu’ils ignorent, c’est que nous sommes des graines qui écloront des sillons de la résistance.

Premiers signataires

  • International and Regional Networks and Organisations
  • Campaña Mesoamericana para la Justicia Climatica
  • Construyendo Puentes – Redes Latinoamericanas Frente al Cambio Climatico
  • Corporate Europe Observatory
  • Friends of the Earth International
  • Jubilee South Asia Pacific Movement on Debt and Development
  • LDC-Watch
  • IBON International
  • Indigenous Peoples of Africa Coordinating Committee
  • Pan African Climate Justice Alliance
  • Push Europe

National Organisations and Networks

  • Aksyon Klima Philipines
  • ATM
  • Attac – France
  • Association des Femmes Peules Autochtones du Tchad (AFPAT)
  • Bangladesh Krishok Federation
  • Bayay Sibuyanon Philippines
  • Beyond Copenhagen
  • Bolivian Platform on Climate Change
  • Campaign for a Life of Dignity for All – Philippines
  • CECOEDECON (Centre for community Economics and Development Consultants Society)
  • CESTA – Amigos de la Tierra El Salvador
  • Ecological Society of the Philippines
  • Ecologistas en Accion (Spain)
  • Ecowaste Coalition Philippines
  • El FORO DEL BUEN AYRE
  • EquityBd Bangladesh
  • Energy and Climate Policy Institute for Just Transition Korea
  • Fairwatch Italy
  • Hodagad Djibouti
  • Institute for Policy Studies
  • Justiça Ambiental Mozambique
  • La Mesa Nacional de Cambio Climático de Guatemala
  • Les Amis de la Terre
  • Our Rivers, Our Life (OROL)- Philippines and Gitib, Inc.
  • PAIRVI (Public Advocacy Initiatives for Rights & Values in India)
  • Peoples Movement on Climate Change
  • Philippines Movement for Climate Justice
  • PRRM
  • Sawit Watch
  • Sociedad CivilAmigos del Viento Meteorología Ambiente Desarrollo
  • Solidaritas Perempuan (Women’s Solidarity for Human Rights)
  • Unidad ecologoca Salvadoreña
  • WomanHealth Philippines
  • Climat ou TAFTA, il faut choisir

    AITEC, Attac France
    https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports-37/article/climat-ou-tafta-il-faut-choisir

    Les politiques de libéralisation du commerce et d’extension des droits des investisseurs renforcent la division internationale des systèmes productifs, font prédominer le droit des investisseurs sur le droit de l’environnement et la démocratie, et ignorent les exigences climatiques. En orientant le développement économique vers l’exportation et la recherche de compétitivité externe à tout prix, elles rendent les économies et nos sociétés ultra-dépendantes des importations et exportations d’énergies fossiles, et dotent les acteurs économiques des instruments pour empêcher la mise en oeuvre de véritables politiques de transition énergétique. Les négociations entre l’Union européenne et les États-Unis (TAFTA) et entre l’UE et le Canada (CETA) promeuvent un modèle énergétique insoutenable, très fortement dépendant des infrastructures d’extraction, de transformation et d’acheminement des énergies fossiles, qui anéantit toute ambition de maîtriser le changement climatique.

     

     

    Satisfaisant les intérêts des multinationales de l’énergie et de l’industrie, l’extension du libre-échange et de la protection de l’investissement privé s’oppose aux exigences de sobriété, de relocalisation des systèmes productifs, de développement des énergies renouvelables et de coopération entre les citoyens, les consommateurs et les communautés pour partager et distribuer les ressources existantes. Conclure des accords de l’ampleur de TAFTA et de CETA réduira presque à néant l’espoir de voir naître « des sociétés plus agréables à vivre, plus conviviales, plus solidaires, plus justes et plus humaines » [1]. Ainsi combattre TAFTA et CETA, c’est lutter contre le réchauffement climatique car c’est préserver la possibilité de mettre en œuvre de véritables pratiques et politiques de transition écologique et sociale.

    TAFTA et CETA libéralisent le marché transatlantique de l’énergie

    Au prétexte de garantir sa « sécurité énergétique » et son approvisionnement en énergies fossiles, l’Union européenne cherche à libéraliser le commerce et les investissements transatlantiques en matière d’énergie et de matières premières. Le mandat de négociations [2] confié à la Commission européenne par les États-membres – qui ne mentionne pas les défis climatiques – est très clair : la Commission doit « assurer un environnement commercial ouvert, transparent et prévisible en matière énergétique et à garantir un accès sans restriction et durable aux matières premières ». Et l’ex-Commissaire européen au commerce, Karel de Gucht, l’avait explicitement confirmé : il souhaitait « permettre aux entreprises européennes d’importer des ressources énergétiques et matières premières des États-Unis ». Les documents fuités dans la presse américaine en mai et juillet derniers [3] le prouvent incontestablement : l’UE souhaite la fin des restrictions américaines à l’exportation de gaz naturel et de pétrole brut. Une série de dispositions prévoit même de faciliter les investissements et l’octroi de licences de prospection, d’exploration et de production d’hydrocarbures aux entreprises étrangères des deux côtés de l’Atlantique.

    TAFTA et CETA encouragent l’exploitation d’hydrocarbures de schiste et de sables bitumineux

    La France et l’Allemagne ont explicitement appuyé cette approche, arguant, crise diplomatique avec Moscou oblige, de l’urgence de substituer de nouvelles sources d’importation au gaz russe, mais jurant que la compensation serait à somme nulle. Si les attentes de l’UE étaient acceptées, l’industrie pétrolière et gazière nord-américaine serait encouragée à étendre la frontière d’extraction du pétrole issu des sables bitumineux dans le nord-est canadien et l’usage de la fracturation hydraulique pour accroître la production d’hydrocarbures de schiste. Soit deux des sources d’hydrocarbures les plus polluantes et dévastatrices pour l’environnement et les populations avoisinantes que l’on connaisse sur la planète. Pour être acheminés de l’autre côté de l’Atlantique, ce gaz et ce pétrole nécessiteraient des investissements colossaux – plusieurs centaines de milliards de dollars – dans la construction de nouveaux pipelines, raffineries et usines de liquéfaction et regazéification des deux côtés de l’Atlantique.

    Pourtant, le gaz de schiste n’est pas une énergie de transition

    Souvent, les responsables politiques européens et américains se retranchent derrière l’argument selon lequel le gaz de schiste serait moins émetteur de gaz à effets de serre que le pétrole ou le charbon lors de sa combustion. Il serait donc possible d’en faire « une énergie de transition » le temps d’abandonner le charbon. Cet argument est pourtant irrecevable pour trois raisons. Des études [4] montrent que le cycle complet de production du gaz de schiste – de l’extraction à la combustion – serait potentiellement plus émetteur de gaz à effet de serre que le charbon, surtout s’il est destiné à l’exportation, qui exige liquéfaction (pour le transport) puis regazéification. Aux regards des exigences climatiques rappelées avec force par le GIEC, et alors que l’UE s’affirme à la pointe de la lutte contre le changement climatique, est-il encore acceptable qu’elle accepte de substituer une énergie fossile à une autre ? L’urgence est au contraire à réduire en valeur absolue la consommation d’énergies fossiles, quelles qu’elles soient. Enfin, les lourds investissements consacrés à la production d’hydrocarbures de schiste, pour des projets que les populations refusent, ne le seront pas pour des politiques de transition énergétique.

     

     

    TAFTA et CETA sabotent déjà la lutte contre les dérèglements climatiques !

    Avec CETA et TAFTA, les normes visant à encadrer et/ou réduire l’importation et la consommation d’énergies fossiles ne sont pas les bienvenues et sont perçues comme des fardeaux réglementaires à supprimer. Fin septembre, la Commission européenne et le Canada ont annoncé avoir finalisé leurs négociations commerciales. Quelques jours plus tard, l’Union européenne renonçait [5] à restreindre l’importation du pétrole issu des sables bitumineux. Rien d’un hasard de calendrier bien au contraire : pour obtenir ce résultat, Stephen Harper, le Premier Ministre canadien, allié aux multinationales du pétrole, a multiplié, des mois durant, les pressions diplomatiques [6] auprès des responsables politiques européens afin que la Directive européenne sur la qualité des carburants ne pénalise pas spécifiquement les entreprises qui produisent, commercialisent et/ou utilisent du pétrole canadien. Depuis, le gouvernement français a jugé que cet accord était un « bon accord » et, le 2 novembre dernier, le jour où le GIEC présentait la synthèse de ses travaux, François Hollande s’est rendu en Alberta pour encourager les investissements français dans les sables bitumineux… L’UE et la France encouragent de cette façon le Canada dans sa logique déplorable : Ottawa a déjà annoncé sa sortie du Protocole de Kyoto et a renoncé à atteindre ses objectifs de réduction d’émissions. Quant aux États-Unis, leur annonce récente non contraignante (réduction de 26 à 28 % de leurs émissions d’ici 2025 par rapport au niveau de 2005) est bien moins spectaculaire une fois ramenée au niveau de 1990 et à un chiffre annuel : -0,43%. On perçoit mieux la modestie de cet objectif lorsque l’on apprécie le boom de l’exploitation et du commerce des hydrocarbures de schiste dans le pays et vers l’Europe.

    TAFTA va accroître les émissions de gaz à effets de serre

    L’étude d’impact commanditée par la Commission européenne reconnaît qu’une libéralisation accrue des échanges transatlantiques générerait une hausse des émissions de gaz à effets de serre de quatre à onze milles tonnes de CO2 par an. Cette hausse, même relativement limitée, n’est-elle pas contraire aux exigences climatiques qui imposent de mettre en œuvre des politiques réduisant drastiquement les émissions de GES ? Plutôt qu’investir dans des programmes de sobriété et d’efficacité énergétique en mesure d’engager l’économie européenne dans une ère post-fossile, TAFTA contribuerait à maintenir et accroître une très forte dépendance aux énergies fossiles en Europe, qui est déjà de 60 % pour le gaz et de 85 % pour le pétrole. Plus généralement, les accords commerciaux contribuent à accroître les échanges internationaux au détriment de politiques de relocalisation des circuits de production et de consommation. L’UE souhaite en l’occurrence que TAFTA et CETA s’inscrivent dans un projet économique global, dans lequel la multiplication des accords de commerce de nouvelle génération la hissera au premier rang mondial des exportateurs. Ainsi, alors que la contribution du commerce de marchandises aux dérèglements climatiques est évaluée à 10% des émissions mondiales, en constante augmentation, elle pratique la fuite en avant.

    Le droit des investisseurs contre le climat

    En faisant primer le droit commercial sur les exigences écologiques et en étendant toujours plus les droits des investisseurs face aux collectivités publiques, les politiques de libéralisation du commerce et des investissements affaiblissent considérablement la perspective de voir déboucher des politiques qui contraindront les activités des multinationales extractives et qui organiseront une véritable transition écologique. Le très controversé mécanisme de règlement des différends investisseur – État fragilisera toute une série de réglementations écologiques dont l’Union européenne, ses pays membres ou collectivités locales déjà existantes, et aura un effet de dissuasion à l’égard de ces derniers lorsqu’ils envisageront des législations futures. C’est ce type de disposition, inclus dans CETA et prévu dans TAFTA, qui permet à l’entreprise Lone Pine Resources de poursuivre le Canada pour le moratoire de la province de Québec sur la fracturation hydraulique [7]. C’est également via ce dispositif, déjà compris dans un certain nombre d’accords bilatéraux d’investissement, que l’entreprise canadienne Gabriel Resources menace d’attaquer la Roumanie parce qu’elle a déclaré envisager d’écouter les habitants de la communauté de Rosia Montana et de limiter l’exploitation de la mine d’or locale. Dans ces dispositifs, nul État ni collectivité publique ne peut en revanche poursuivre une entreprise qui n’accepterait pas de se soumettre aux réglementation environnementales publiques existantes ; celles-ci ont le monopole de la force de contrainte et de sanction que procure le régime international de l’investissement codifié dans CETA et dans TAFTA.

    Engager des politiques et des lois efficaces pour enrayer durablement les dérèglements climatiques appelle donc, au minimum, d’admettre une certaine hiérarchie des urgences et des légitimités, et de soumettre les droits du commerce et des investisseurs au droit international des hommes et de l’environnement.

    Le droit commercial contre la transition énergétique

    Organiser la transition énergétique exige de promouvoir des énergies renouvelables à l’échelle des territoires, dans une logique de coopération et de partage des connaissances et des savoir-faire, qui suppose des modes de soutien et de gestion associant les collectivités locales, les consommateurs et les PME ou coopératives de production. Or ces accords de libre-échange réduiront très sensiblement la capacité des États et des collectivités locales à accompagner ces mutations. Selon le texte final de l’accord UE-Canada, qui préfigure largement le contenu du TAFTA, les collectivités publiques – États, régions, municipalités, UE en tant que telle… – ne pourront ni adopter ni maintenir des mesures imposant un minimum de contenu, de production ou de consommation locale à une entreprise investissant sur leur territoire, ni exiger que celle-ci s’associe à des entrepreneurs locaux ou nationaux, ni obliger la dite entreprise à transmettre son savoir-faire localement, notamment via l’ouverture des droits de propriété intellectuelle qu’elle détient sur une technologie ou un mode opératoire. Il sera également impossible d’introduire des formes de subventions préférentielles à des acteurs économiques locaux au détriment d’entreprises dont les activités seraient exclusivement exportatrices. En effet de tels instruments politiques sont considérés par le droit du commerce et de l’investissement comme des distorsions à la libre-concurrence ou comme des restrictions à la liberté des investisseurs étrangers. Des précédents attestent du risque effectif pour la puissance publique puisque des mesures de ce type ont déjà été contestées et invalidées. Le programme de développement des énergies renouvelables en Ontario (Canada) a du être abandonné sous la pression du Japon et de l’Union européenne. Les États-Unis ont également attaqué l’Inde devant l’Organe de règlement des différends de l’OMC en raison de son programme d’appui à la filière solaire nationale, qui obligeait les opérateurs étrangers à acheter les panneaux solaires à des entreprises locales. Ce sont pourtant des flexibilités indispensables pour qu’une collectivité locale ou qu’un État puissent soutenir le déploiement des renouvelables sur tous les territoires. Ces critères de localité et de qualité sont également de puissants outils pour relocaliser des emplois et des activités à travers la promotion de produits et de compétences locales, et l’utilisation des meilleures technologies disponibles.

    Le commerce international fait disparaître des émissions de CO2 !

    A travers le commerce international, ce sont les émissions incorporées aux biens et services échangés qui circulent d’un pays à l’autre. Ces émissions, fruit de la production de ces biens et services et des consommations intermédiaires qu’ils nécessitent, représenteraient, selon plusieurs études [8], près de 28 % des émissions mondiales de CO2 alors qu’en 1990, ce chiffre n’était que de 18%. En longue période, le commerce international ayant augmenté plus vite que le PIB, les émissions qui sont incorporées aux biens échangés augmentent plus vite que les émissions globales : + 4,3 % par an en moyenne sur 2000 – 2008 contre + 3,4 % pour les émissions globales [9]. Tout comme certains pays exportent plus de biens qu’ils n’en importent, disposant ainsi d’une balance commerciale positive, certains pays, au niveau des émissions, sont exportateurs nets d’émission quand d’autres en sont importateurs nets. Les pays les plus riches sont essentiellement des pays importateurs nets d’émission. La Chine est exportatrice nette d’émissions, à hauteur de 27 % de ses émissions totales. La comptabilisation de ces émissions importées ne serait pas importante si elle ne changeait pas totalement la façon dont évolue les émissions d’un grand nombre de pays. Ainsi, en France, les émissions ont officiellement diminué de 7 % entre 2000 et 2010 (- 6% pour l’UE). Mais si l’on tient compte des émissions incorporées dans les importations et exportations, on calcule que les émissions de CO2 ont augmenté de 15 % sur la période (+ 9 % pour l’UE). Ainsi, à travers le commerce international, c’est l’empreinte carbone de toute une série de pays qui tend à se réduire et à devenir invisibles pour s’agréger à celle d’autres populations, généralement plus pauvres et bien moins émettrices de gaz à effets de serre. Est ainsi dissimulée dans le commerce international une part importante des émissions liées aux choix de consommation des populations des pays riches.

    Conclusion

    TAFTA et CETA, et plus généralement les politiques de libéralisation des échanges et de l’investissement, représentent des incitations – institutionnelles, juridiques et économiques – nouvelles à l’expansion du commerce transatlantique des énergies fossiles. La dépendance des économies européennes aux énergies fossiles n’en sera que renforcée et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, des deux côtés de l’Atlantique, encouragée. Cette perspective est-elle bien compatible avec les objectifs de réduction de 30 % de la consommation de ressources fossiles d’ici 2030 et de division par quatre des émissions de GES d’ici 2050 comme prévu par le premier article du projet de loi sur la transition énergétique voté à l’automne 2014 ? Si François Hollande est réellement convaincu que le sort de l’humanité se joue avec le réchauffement climatique, comme il l’a récemment affirmé à plusieurs reprises, alors pourquoi ne pas conditionner tout nouvel accord de libéralisation des échanges et d’investissement au respect des responsabilités climatiques des pays les plus émetteurs et les plus pollueurs ?

    Document coordonné par Maxime Combes et Amélie Canonne.

    Trémargat, laboratoire d’alternatives et de démocratie participative à ciel ouvert

    Marion Guyonvarch
    www.bastamag.net/Reportage-Tremargat

    A Trémargat, dans les Côtes d’Armor, la solidarité, l’entraide ou l’écologie ne sont pas de vains mots. La petite commune bretonne est depuis vingt ans un laboratoire à ciel ouvert de projets alternatifs. Ses habitants soutiennent l’installation de paysans, s’approvisionnent dans une épicerie de produits bio et locaux, se retrouvent au café associatif, délibèrent au sein d’un conseil municipal qui applique des principes de démocratie participative, et s’éclairent avec Enercoop. La formule fonctionne : le village qui se mourait dans les années 70 est depuis quinze ans en pleine renaissance. La preuve qu’on peut vivre autrement. Reportage.

    Un samedi matin gris de novembre. Il pleut des cordes sur Trémargat, un village des Côtes d’Armor, perdu au cœur du Kreiz-Breizh (Centre Bretagne). Pourtant, sur la place centrale, une armée silencieuse a adopté le ciré pour uniforme et, bravant les gouttes, ratisse, bine et nettoie les parterres de fleurs. « On organise un chantier participatif pour terminer l’aménagement du bourg, explique Yvette Clément, la maire, une brouette à la main. Nous, on s’occupe des espaces verts, et une autre équipe, installée sous un hangar plus loin, construit six bancs en bois qui seront installés sur la place. »

    L’initiative est loin d’être une première : l’an dernier, le centre du village a été totalement transformé grâce à la participation d’habitants bénévoles. « C’est une idée du précédent conseil municipal, raconte Yvette, élue en mars dernier à la tête de cette commune de 180 habitants. Un projet d’aménagement classique, bétonné, avait été proposé par un cabinet. Cela aurait coûté 120 000 euros, soit la quasi totalité du budget annuel. »

    La mairie choisit alors de faire appel aux bonnes volontés et de créer un théâtre de verdure, au cœur du village. « Les paysans sont venus avec leurs tracteurs, les charpentiers ont construit une pergola. C’est bien plus joli et cela n’a coûté que 12 000 euros ! »

    Ce chantier est emblématique de la façon de fonctionner made in Trémargat. Ici, l’adjectif participatif n’est pas un vain mot. Il est appliqué à la lettre et décliné dans tous les domaines : politique, culturel et économique. « On pratique la politique du colibri, résume Yvette, en faisant référence à Pierre Rabhi. Chacun fait sa part ! » Tout le monde s’investit, au service de valeurs communes : l’écologie, l’entraide, et la décroissance. Plus qu’une terre, les habitants partagent une volonté de vivre ensemble, autrement.

    Des agriculteurs néo-ruraux contre le modèle productiviste breton

    C’est dans les années 70 que Trémargat s’est parée de ses couleurs vertes. A l’époque, le centre Bretagne se vide de ses habitants, et la commune, comme ses voisines, meurt à petit feu. Jusqu’à ce que plusieurs jeunes agriculteurs néo-ruraux s’installent dans ce village pauvre, où la terre est peu chère et disponible. Tous se revendiquent paysans et croient en une agriculture raisonnée, à mille lieues du modèle productiviste breton. Parmi eux, Yvette et son mari, qui ont repris une bergerie de 40 hectares. « On est venus car il y avait des fermes pas chères, raconte-t-elle. On a trouvé ici des agriculteurs qui étaient sensibles à ces questions, on a commencé à réfléchir et travailler ensemble à des solutions alternatives pour préserver l’environnement. »

    Séduits par cet état d’esprit qui se diffuse doucement dans la bourgade, de nouveaux venus les rejoignent au fil des ans. Potier, artisans, coiffeur, restauratrice… posent leurs valises pour de bon. Résultat, l’hémorragie démographique est stoppée. Depuis le début des années 1990, la population s’est stabilisée et a considérablement rajeuni, comptant aujourd’hui une trentaine d’enfants. Preuve du dynamisme de Trémargat, la commune ne peut pas satisfaire toutes les demandes de personnes souhaitant venir s’installer !

    Des mandats limités dans le temps

    Si le terreau était depuis longtemps favorable à l’éclosion de projets alternatifs, il a fallu attendre 1995 pour qu’ils commencent à être menés à grande échelle. Cette année-là, les « nouveaux » remportent la mairie, tenue jusqu’alors par une famille « historique » du village. Ils mettent en place une vraie démocratie participative à l’échelle locale, avec la volonté de promouvoir l’écologie et la solidarité, deux valeurs qui structurent leur mode de vie. Leur première décision est de pratiquer la politique de la mairie tournante : le maire ne fait qu’un seul mandat ! Surtout, il applique un programme décidé en commun avec les habitants. « Avant les élections, quatre réunions publiques sont organisées, explique Mélanie, élue pour la première fois en mars. On y fait le bilan du mandat précédent et on définit ensemble les priorités du suivant. Ensuite, ceux qui le souhaitent se portent volontaires pour constituer la liste. »

    Les grands axes du programme sont donc élaborés par les habitants eux-mêmes. L’élection passée (comme souvent dans les petites communes, il n’y a qu’une liste), ceux qui le souhaitent – et ils sont nombreux – restent impliqués, via les comités consultatifs constitués pour suivre la mise en place de chacun des thèmes du programme. Nouvelle venue dans la commune, Madeline, la vingtaine, formatrice en agro-écologie, est bluffée par cette « vraie » démocratie participative : « C’est du bon sens, c’est un fonctionnement que beaucoup de monde aimerait voir mis en place sans y arriver. Mais ici ça marche, parce que tout le monde en a envie et s’en donne les moyens. »

    Mais attention, prévient Jennifer Corbeau, une jeune agricultrice élue au conseil, tout n’est pas idyllique : « Ça ne se fait pas tout seul. Il y a des clashs, des désaccords, des débats interminables, des projets qui n’aboutissent pas, des gens qui ne participent pas. Mais dans l’ensemble ça fonctionne. Car la plupart des gens vivent là, partagent un même état d’esprit et sont emportés par cette dynamique collective. Ça donne envie de s’impliquer à son tour. »

    « Des combines pour ne pas être désintégrés »

    Se concerter, décider et agir ensemble : à Trémargat, c’est devenu un réflexe. Avec pour leitmotiv, le refus de subir un développement dicté par d’autres, comme le résume Yvette : « On nous taxe souvent de marginaux, mais on fait partie du même système économique que tout le monde. On trouve juste des combines pour ne pas être désintégrés et garder la maîtrise.  » Ainsi, quand le café – installé dans un bâtiment racheté par la mairie – cherche un repreneur en 2008, une poignée d’habitants décide de monter un projet de café associatif alternatif. Un couple de candidats classiques se présente, mais les Trémargatois ont envie d’en faire un lieu à leur image. Aujourd’hui, on y boit et on y mange des produits bios, locaux et artisanaux. On y organise des soirées jeux, des lectures, des concerts, des projections de documentaires…

    Géré par un bureau collégial de huit membres, le café associatif fonctionne avec une quinzaine de bénévoles et deux salariés à mi-temps. C’est le point de ralliement du village, son cœur. « C’est un lieu de vie fondamental, peut-être encore plus ici qu’ailleurs, car il y a un rapport et un attachement très forts au café, explique Aurélie, l’une des deux salariées. Le vendredi soir, c’est tout le temps plein. » Ce midi aussi, le Trémargat café affiche complet. Une grosse marmite de soupe attend les courageux du chantier participatif. Des gamins courent partout, pendant que leurs parents ou des habitants plus âgés discutent du chantier ou des derniers potins. Jennifer, accoudée au comptoir, sourit : « Vous voyez, toutes les générations se mélangent, c’est toujours comme ça ici. Il y a une vraie volonté de vivre ensemble. »

    80 000 euros de chiffres d’affaires pour l’épicerie du village

    Au fond du bar, une porte s’ouvre sur un autre lieu clé du village : l’épicerie. Là encore, elle a été pensée par et pour les habitants. Quand elle apprend que ce bâtiment voisin du café va être mis en vente, la mairie se montre intéressée. Et le projet de rouvrir une épicerie, dix ans après la fermeture de la dernière du village, ressort des cartons. Mais pas question de se lancer à l’aveugle. Une étude de marché est menée pour déterminer ce qui est susceptible d’attirer des acheteurs. « Surprise, la majorité des personnes sondées voulaient acheter des produits bio pas trop chers et du local », se souvient Vincent Munin, adjoint à la mairie et membre du collectif gestionnaire. Le choix est donc fait : ce sera bio et local. Les horaires d’ouverture sont choisis en fonction des demandes et l’épicerie, gérée par une association, fonctionne elle aussi grâce aux bénévoles. Un système d’abonnements, qui permet d’acheter à prix coûtant, a été mis en place pour constituer une base de clients fidèles.

    Et ça marche. Deux ans après son ouverture, l’épicerie, qui travaille avec trente producteurs de la région et trois grossistes pour le bio, rencontre même un succès qui dépasse toutes les attentes. Vingt-cinq familles – soit un tiers des ménages de la commune – sont abonnées ; s’y ajoutent une cinquantaine de clients plus ou moins réguliers, qui viennent de Trémargat et des communes alentour. « On tablait sur un chiffre d’affaires de 60 000 euros pour être à l’équilibre. On a fait 80 000 l’an dernier et en 2014, ce sera encore plus ! » L’épicerie renforce encore davantage le lien social. « C’est un lieu de vie supplémentaire, c’est important, analyse Vincent Munin. On y prend des nouvelles, les informations circulent. Pour ceux qui ne vont pas au café, c’est un moyen de socialiser. »

    La première commune alimentée par Enercoop

    Garder la maîtrise. Pour y arriver, Trémargat déploie tous les moyens à sa disposition. Elle a ainsi établi un plan local d’urbanisme (PLU), en 2006, pour imaginer le futur visage de Trémargat. Peu fréquent pour une commune de cette taille, le document a permis de protéger les zones humides et bocagères et de rendre constructibles une quarantaine de parcelles dans des hameaux, afin de pallier au manque de foncier. Surtout, il permet à la commune d’être plus autonome quant à ses choix de développement. Trémargat est aussi la première commune française à avoir choisi d’être alimentée en électricité par la coopérative de l’énergie Enercoop qui privilégie les énergies renouvelables. Du coup, la coopérative y a installé son siège social breton.

     

    Malgré l’anticléricalisme d’un bon nombre d’habitants, la commune a aussi accepté de gérer la rénovation de l’église, financée à 90% par des subventions. Mais à une condition : désacralisée, elle pourrait accueillir les associations. Un accord inédit a même été signé entre le curé, la mairie et les associations pour entériner la situation.

    Mieux, Trémargat a décidé de peser sur l’orientation économique de la commune. Sur les 14 fermes que compte le village, 12 sont aujourd’hui adhérentes au Cedapa (Centre d’étude pour le développement d’une agriculture plus autonome) qui promeut une agriculture durable. Pour maintenir cet équilibre, la commune est déterminée à favoriser l’installation d’agriculteurs écolos. Oui, mais comment faire, puisqu’elle ne peut financer des projets privés ? Une solution est trouvée : une Société civile immobilière (SCI) va être constituée, afin de soutenir le projet d’installation de Jennifer et de son compagnon, originaire de la commune. « On avait repris une ferme dans le centre bourg on voulait acheter une parcelle pour faire paître nos brebis et nos vaches allaitantes », raconte Jennifer. Le couple a trouvé une parcelle idéale, sur une commune voisine, mais n’a pas les 60 000 euros nécessaires, après avoir déjà beaucoup investi dans la ferme et la création d’un laboratoire pour ses produits laitiers. La mobilisation a sonné : la SCI va réussir à regrouper une centaine d’associés, dont la commune, des particuliers, des associations. Et réunit les fonds pour acheter le terrain.

    « C’est super de voir cet élan, raconte la jeune femme. On a des clients de Saint-Brieuc qui ont pris des parts. Un tel soutien, ça porte ! » Impliqué dans le projet dès sa création, Vincent Munin estime que la SCI est une arme importante : « Cela permet de pouvoir réagir rapidement et de mobiliser des fonds pour monter un projet. » La SCI pourrait prochainement racheter un local artisanal bientôt mis en vente. « On a pensé en faire une plateforme bois, explique Yvette Clément. Cela serait assez cohérent puisque un groupe d’agriculteurs de la commune lance un projet bois, destiné à voir comment protéger et valoriser au mieux cette ressource de la région. »

    Vers un projet d’éco-habitat intergénérationnel ?

    Assise dans le café, la maire regarde l’avenir avec confiance et fait le point sur les grands chantiers qui attendent Trémargat. « Dans le programme commun, nous avons choisi de nous concentrer sur la préservation des espaces naturels qui représentent 50% du territoire de la commune. De créer un site internet, et d’entretenir et améliorer encore le centre bourg. Nous avons aussi commencé à réfléchir à un projet d’éco-habitat intergénérationnel. » D’autres idées sont dans l’air, comme la création d’un atelier de mutualisation des services, pour effectuer des réparations en commun ou partager les outils nécessaires afin de préparer du jus de pomme.

    Trémargat semble armée pour continuer à vivre comme elle l’entend. Oubliée l’époque où ses voisins regardaient la commune d’un œil circonspect. Devenue un modèle dans les cercles alternatifs, elle a peu à peu gagné le respect du plus grand nombre. « On continue d’intriguer un peu, estime Yvette. Mais on a prouvé des choses. On ne nous voit plus comme des rêveurs, mais comme une commune qui se débrouille et qui innove. » Si d’autres communes pouvaient rêver et innover comme eux…

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